Retour d’expérience

Gaëlle Hallez - Professeur d'espagnol

 

“L’ère du numérique a crée un nouveau monde qui bouleverse l’ensemble de notre quotidien” Serge July

 

J’ai eu la chance de pouvoir assister, dans le cadre d’échanges à buts pédagogiques, entre professeurs, aux cours de Sébastien Guilleron, enseignant d’anglais au lycée Pierre Mendès France de Péronne.

J’ai appris beaucoup lors de ces échanges et il y aurait beaucoup à dire, néanmoins je ferai ici un retour sur deux points essentiels: le changement de posture de l’enseignant et le changement de l’organisation spatiale de la salle de classe et une activité très en vogue, le Green screen.

 

Changement de posture de l’enseignant  et  de l’organisation spatiale de la salle de classe

 “Mais c’est quoi cette classe!!” telle fut la première réflexion qui me vint à l’esprit en entrant dans la classe de Sébastien Guilleron.

En effet, lorsque vous pénétrez dans l’antre de Sébastien, vous arrivez dans une classe dépourvue de bureau et organisée en îlots. Cette disparition du bureau s’est faite au profit d’une organisation plus épurée et sans doute plus fonctionnelle.

« A quoi me servirait un bureau ? » me répondit-il.

C’est vrai ! A quoi servirait un bureau, cette forteresse indomptable et intouchable représentant l’autorité hiérarchique par excellence. Je dois avouer qu’après ce passage dans sa classe je me pose encore la question.

 

Cette organisation de la classe génère plus de proximité et d’échanges avec le groupe classe, le professeur n’est plus prisonnier d’un point fixe mais est en libre circulation dans la classe, ce qui optimise sans doute la dynamique de la classe, l’enseignant se voit plus impliqué et plus investi dans les différentes interactions de ses élèves. Il ne faut pas voir cette suppression matérielle comme une suppression des barrières hiérarchiques, au contraire, j’ai pu constater que les élèves avaient parfaitement conscience du rôle de chacun dans cette salle de classe atypique. Et finalement, ont-ils vraiment besoin de la présence matérielle d’un bureau pour reconnaître l’autorité hiérarchique du professeur ?

Au delà de l’aspect matériel et de la disposition spatiale de la classe, je dois signaler un autre changement tout aussi important qui est la posture de l’enseignant.  Là encore, je fus dans un premier temps sceptique puis finalement impressionnée. Sébastien a su se libérer de beaucoup d’entraves qui gênent un professeur dans l’exercice de son métier, je parle évidemment des notes concernant son cours, des documents papiers éventuels… J’ai eu la chance de pouvoir assister à une analyse de document sur la société Victorienne à travers le prisme du conte Alice aux pays des Merveilles. Nous savons tous parfaitement qu’une étude de document n’est pas chose aisée dans l’enseignement, ce sont toujours les mêmes élèves qui participent, le document ne plaît pas, la peur du mur du silence… 

Ici Sébastien s’est positionné en preneur de notes, mais un preneur de notes atypique !  En effet, il donnait uniquement les amorces aux élèves, amorces auxquelles ces derniers répondaient alors que Sébastien prenait en note les réponses des élèves sur  l’iPad pro.

 

L’écran de l’iPad pro s’affichait directement  au tableau via une Apple TV, de cette façon les élèves pouvaient voir leur intervention et ainsi faire appel à l’autocorrection et à l’inter correction. Cette façon d’interagir, à laquelle ses élèves sont sans nul doute habitués, continua jusqu’à la fin de l’heure. 

« Mais, et la trace écrite ? Ils partent sans rien ?! » Pensai-je alors lorsque la sonnerie retentit.

Eh non ! Aucune trace écrite réalisée en fin d’heure. Effectivement, Sébastien envoie simplement les notes qu’il a prises sur l’ENT, notes que les élèves vont rechercher dans leur espace commun, ce qui leur servira de trace écrite. Et finalement, avec le recul, il faut avouer que cette façon de procéder, même si elle peut sembler chronophage au début, permet un gain de temps énorme et surtout une productivité des élèves optimale et constante sur toute l’heure de cours puisqu’ils sont beaucoup plus actifs.

Pour terminer sur ce point, je ferai référence à un article lu récemment et qui a fait écho lorsque j’ai assisté aux cours de Sébastien. Il s’agit de l’article de Stalford 

dans lequel  il est dit que l’implantation de nouvelles méthodes pédagogiques oblige à transformer les salles et les espaces. Mais il est stipulé également qu’une salle de classe aux conditions optimales améliore la productivité des élèves de 25 %. Est-ce que la classe de Sébastien fait partie de ces classes optimales ? Je dirai simplement que c’est en bonne voie.

Green screen : Comment se mettre au vert ?

Cette activité très tendance en ce moment a su faire ses preuves sur le plan pédagogique. Elle révolutionne la sphère de l’enseignement et redéfinit notre discipline.  

Le point fort de cette application est qu’elle permet de contextualiser l’action et la tâche demandée à l’élève, de cette façon l’ensemble gagne en crédibilité. Elle offre la possibilité de réaliser un nouveau type de tâche plus proche de la réalité et tout ceci a une influence certaine sur la classe. En effet, il s’est avéré que les élèves les plus introvertis deviennent de véritables acteurs lors de ces tâches. En observant une des classes de Sébastien, un groupe d’élèves s’est démarqué par la qualité du travail. Je fus  réellement surprise en voyant la qualité, l’organisation de ce groupe et leur niveau d’oral. C’est après avoir salué la prestation de ces élèves que Sébastien m’a avoué que ces derniers étaient très timides, qu’ils ne participaient que très peu en classe. J’eus moi-même quelques difficultés à le croire, y aurait-il une solution magique pour aider nos élèves introvertis à s’épanouir en classe ?

C’est pour cette raison que j’ai décidé de tester moi-même cette application avec mes classes. Ce ne fut pas sans peur, en effet j’ignorais si j’allais être capable de faire ça aussi bien que Sébastien ?

Et finalement, le retour est positif. Effectivement, je confirme que Green screen a une influence magique. Elle provoque une certaine émulation et un engouement chez les élèves que nous ne voyons que très rarement lors de la réalisation de tâches plus traditionnelles. Mes élèves les plus en difficultés, ne participant que très peu, se sont transformés en moteur de cette tâche à réaliser en prenant le rôle de présentateur, un rôle loin d’être évident, rappelons que c’est à lui d’animer le débat, de présenter les invités et de faire vivre l’émission, c’est donc sur lui que tout repose !! 

La mise en place de cette activité et le résultat qui en découle me pousse à me remettre en question, quelle place devons nous accorder à ces nouvelles méthodes ? L’intérêt de tous les élèves n’est-il pas primordial ? Ne devons-nous pas, en constatant ce résultat, intégrer davantage ces activités dans nos enseignements ?

 

Il n’y a pas de réponse déterminée à ces interrogations, ce sont des pistes de réflexion, une réflexion que j’ai pu mener aux côtés de Sébastien bien évidemment mais aussi aux côtés d’autres enseignants qui pratiquent aussi la mise en place de ces nouvelles activités dans leurs classes. S’essayer à ces nouvelles méthodes n’est pas une sinécure, il y a des échecs, des choses à revoir mais très souvent le résultat en vaut la peine.


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